Je ne suis pas fan du Ballon d’Or, comme je ne suis pas fan des récompenses individuelles dans des œuvres collectives en général. Ceci dit, je me surprends à être content qu’il soit revenu à Ousmane Dembélé, précisément parce que ce choix intègre une dimension collective, que Vincent Duluc a relevé dans son édito de L’Équipe du 23 septembre. Introuvable sur le web, je le reproduis ici :
Accomplissement d’un destin fascinant et tortueux, le Ballon d’Or d’Ousmane Dembélé dit que toutes les histoires sont possibles dans ce jeu. Il dit, aussi, qu’un joueur peut se réinventer a 27 ans, se défaire de sa réputation de menacer les pigeons, à l’automne, pour danser sur le toit de l’Europe, au printemps. Le sacre individuel de l’attaquant du PSG récompense la meilleure équipe européenne de la saison et la plus collective, qui aura imposé un style dont il a été tout à la fois le symbole, le finisseur et le moteur. S’il n’y avait eu que ses buts, il serait un Ballon d’Or presque ordinaire, et donc aussi extraordinaire que les autres, puisque cette récompense s’attache régulièrement aux artistes de son espèce. Mais la nouvelle grille de lecture du monde du foot, déjà sensible la saison dernière avec la désignation de Rodri, a également servi Dembélé, qui n’a pas seulement séduit par ses dribbles, son patrimoine de départ, ou par ses buts, sa grande œuvre de 2025. En parallèle de l’aura joyeuse qui émane d’un joueur adoré de ses vestiaires, son Ballon d’Or récompense un formidable travail de pressing et de harcèlement, qui s’est étendu comme une contagion dans sa propre équipe, où elle reste un préalable, mais aussi dans le reste du football européen, les autres attaquants ne pouvant plus opposer à leur entraîneur qu’il leur faut garder un peu d’énergie pour finir leurs actions. Sixième Ballon d’Or français de l’histoire, Dembélé a changé de planète hier soir, mais c’est comme si l’on savait déjà qu’il ne s’éloignerait pas du collectif qui l’a porté, et que les votants ont plébiscité en plaçant cinq joueurs parisiens dans le top 10. En théorie, il va devenir une star, ou alors il l’est déjà, mais on dirait que l’étiquette ne collera pas, ou pas complètement. En regard des joueurs qui ont évoqué le Ballon d’Or dès leur première interview à la sortie de l’adolescence, Dembélé vient des tréfonds, ce qui compense toutes les prévisions qui ne s’accomplissent jamais. La soirée magique du Châtelet, émouvante, tant le Parisien a été gagné par les larmes quand il tentait de formaliser un bonheur trop grand, prolonge un printemps glorieux pour le PSG et le football français, vers lequel cette gloire remonte par capillarité, même si la manière dont son football de clubs est géré ne le mérite pas toujours. S’il n’avait pas été blessé, Dembélé n’aurait même pas pu venir toucher le rêve d’une vie, hier soir, et cela aurait été peu supportable, parce que c’était un bonheur à montrer au monde.
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